Bien’ici Pro / Actus Pro / Le paysage juridique s’éclaircit autour de la loi littoral
Rappel : face à la pression urbaine, aux phénomènes d’érosion ou de submersion marine qui menacent les territoires de bord de mer, la loi Littoral du 3 janvier 1986, qui concerne plus de 1 200 communes, s’est fixée pour objectif principal de concilier préservation, développement et mise en valeur du littoral. Elle vise à une urbanisation cohérente et maîtrisée des territoires littoraux, en continuité des agglomérations et villages déjà existant. Elle oriente également le développement urbain prioritairement vers les secteurs rétro-littoraux, tout en évitant le "mitage" – c'est-à-dire l'implantation d'édifices dispersés dans un paysage naturel – protégeant ainsi des altérations humaines les espaces naturels les plus sensibles du littoral, en front de mer.
Mais la loi Elan du 23 novembre 2018, postérieure, permet de combler les "dents creuses", à savoir les parcelles vides situées entre deux bâtiments construits dans un même hameau au bord de la mer, au sein de "secteurs déjà urbanisés".
La cohabitation entre ces deux textes de loi méritait un éclaircissement. Il commence de se faire jour, grâce notamment aux premières décisions du Conseil d’État.
Ces premières décisions consacrent en premier lieu le rôle accru des SCoT (Schémas de cohérence territoriale). Les SCoT sont garants du respect des principes du développement durable, et notamment de l’équilibre entre un développement urbain maîtrisé et la préservation des espaces naturels.
Illustration : un projet conduisant à étendre l'urbanisation d'un espace proche du rivage ne peut être autorisé que s’il est limité, d’une part, et s'il est justifié et motivé, d’autre part, dans le plan local d'urbanisme (PLU). Toutefois, Dans une décision du 11 mars 2020, le Conseil d'État énonce que lorsque le SCoT comporte des dispositions suffisamment claires, précises et compatibles avec la loi Littoral, le "caractère limité" de l'urbanisation s'apprécie en tenant compte de ses dispositions. En l’espèce, dans l’affaire jugée, les Sages ont estimé que la règle de l'extension limitée de l'urbanisation d’un espace proche du rivage n'avait pas été méconnue.
Le Conseil d’État a également validé le décret n° 2019-482 du 21 mai 2019, fixant la liste limitative des aménagements légers pouvant être autorisés dans les espaces remarquables du littoral. Des "canalisations nécessaires aux services publics ou aux activités économiques" par exemple, sont considérées comme telles.
Enfin, le Conseil d'État a jugé que le simple agrandissement de 42 m2 d’une construction existante de 105 m2, ne peut être regardé comme une extension de l’urbanisation.
La cour administrative d'appel (CAA) de Nantes, quant à elle, a reconnu pour la première fois l’existence d'un "secteur déjà urbanisé" s’agissant d'un terrain desservi par les réseaux d'eau, d'assainissement et d’électricité, situé dans un secteur où une cinquantaine de constructions sont regroupées. Autant de décisions qui offrent un peu plus de visibilité aux porteurs de projets de constructions en bord de mer.